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là, beaucoup sont morts de faim et de soif, car l’une et l’autre nous tourmentaient. Puis, nous arrivâmes, par la terre Magnètique, le pays des Makédoniens, le cours de l’Axios, le marais couvert de roseaux de Bolbè et le mont Pangaios, au pays des Édôniens. Cette nuit-là, un Dieu nous envoya un hiver précoce qui gela les eaux du Strymôn sacré. Alors, chacun de ceux qui auparavant niaient qu’il y eût des Dieux, pria et adora Gaia et Ouranos. Après avoir mille fois invoqué les Dieux, l’armée passa par cette route glacée, et ceux des nôtres qui purent passer avant que les rayons du Dieu se fussent répandus eurent la vie sauve. En effet, l’orbe ardent et resplendissant de Hèlios échauffa bientôt de ses flammes le milieu du fleuve et le rompit, et tous roulèrent les uns sur les autres, et les plus heureux furent ceux qui rendirent l’âme le plus promptement ! Les survivants se sauvèrent avec de grandes fatigues à travers la Thrèkè, mais bien peu sont revenus dans les foyers de la patrie. Que le royaume des Perses gémisse, regrettant sa très-chère jeunesse ! Ces choses sont vraies, mais je n’ai point dit la multitude des autres maux dont un Dieu a accablé les Perses.

LE CHŒUR DES VIEILLARDS.

Ô Daimôn très-funeste, combien tu as écrasé outrageusement sous tes pieds toute la race des Perses !

ATOSSA.

Ô malheureuse que je suis ! l’armée est détruite ! Ô apparition de mes songes nocturnes, tu m’as clairement annoncé ces maux ! Mais vous, vous avez été de mauvais