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LE CHŒUR DES EUMÉNIDES.

Ni Apollôn, ni la puissance d’Athènaia ne te protégeront. Il faut que tu périsses, ignominieusement rejeté de tous, ne connaissant plus la joie de l’esprit, n’ayant plus de sang, vaine ombre, pâture des Daimones, ne pouvant ni répondre, ni parler, engraissé pour m’être voué ! Je te mangerai vivant ! Tu ne seras pas égorgé à l’autel. Écoute cet hymne qui t’enchaîne : — Allons ! chantons en chœur ! Il nous plaît de hurler le chant effroyable, et de dire les destinées que notre troupe dispense aux hommes. Mais nous nous glorifions d’être de justes dispensatrices. Celui qui étend des mains pures, jamais notre colère ne se jettera sur lui, et il passera une vie saine et sauve ; mais quiconque a fait le mal, comme cet homme, et cache des mains sanglantes, nous lui apparaissons, incorruptibles témoins des morts, avec force et puissance, et nous lui faisons payer le sang répandu !

Strophe I.

Ô mère ! ô Nuit, ma mère, qui m’as enfantée pour le châtiment de ceux qui ne voient plus et de ceux qui voient encore, entends-moi ! Le fils de Latô me prive de mes honneurs en m’arrachant ma proie, cet homme qui doit expier le meurtre de sa mère. Ce chant lui est voué, folie, délire troublant l’esprit, hymne des Érinnyes enchaînant l’âme, hymne sans lyre, épouvante des mortels !

Antistrophe I.

La Moire toute-puissante m’a fait cette destinée im-