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que ce songe s’accomplisse pour moi ! Ainsi que je l’interprète, il concorde avec la vérité. En effet, le serpent est sorti du même sein que moi, et il a été enveloppé dans les mêmes langes. Il a sucé les mamelles qui m’ont nourri, il a mêlé le sang à leur lait ; et, dans sa terreur, ma mère a gémi de ce mal terrible. De même qu’elle a allaité un monstre immonde, de même elle doit mourir par la violence. C’est moi qui la tuerai, changé en dragon, comme ce songe le révèle. Je te prends pour juge de l’interprétation de ce prodige.

Le Chœur des Khoèphores.

Que cela soit ainsi ! Mais dis à tes amis s’il faut que d’autres que toi agissent, ou s’il faut qu’ils se tiennent en repos.

Orestès.

Ma réponse est simple. Je veux qu’Èlektra rentre dans la demeure, et je lui recommande de cacher mes desseins. Ils ont tué par ruse l’homme vénérable ; ils mourront aussi par ruse et seront pris dans le même piége, ainsi que l’a prédit le Roi Apollôn Loxias, l’infaillible Divinateur. Moi, semblable à un étranger, et chargé de divers bagages, j’arriverai aux portes de la cour intérieure, comme un hôte et un compagnon de guerre, avec le seul Pyladès. Tous deux, nous parlerons la langue Parnèside, avec l’accent Phokéen. Certes, nul des gardiens des portes ne nous recevra avec bienveillance, car toute cette maison est troublée par la colère des Dieux. Mais nous resterons, afin que quelque passant dise, nous voyant devant la demeure : — pourquoi repousser