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PARFUM D’ADÔNIS


L’Anémone et la Rose



Sur la couche d’ivoire où nous te contemplons
Tu dors, cher Adônis, Éphébe aux cheveux blonds !

Ô jeune Dieu, pleuré des Vierges de Syrie,
Quand le noir sanglier blessa ta chair fleurie,
Et s’enfuit, te laissant, immobile et sans voix.
De ton sang rose et frais baigner l’herbe des bois,
Sur la montagne et dans les profondes vallées
On entendit gémir les Nymphes désolées,
Et l’écho prolongea leurs pieuses douleurs ;
Et Kypris, les cheveux épars, les yeux en pleurs,
T’enveloppant encor d’une suprême étreinte,
Troubla la paix des cieux de sa divine plainte :

— Adônis, Adônis ! Tu meurs, et je t’aimais !
Te voilà mort, et moi, je ne mourrai jamais !