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le songe d’hermann

lamente, ô cette admiration filiale du globe où je suis né, Siegel ! tout cela n’est-il donc pas ? Dieu nous a-t-il créés pour l’enfer éternel, avec la vision splendide du bonheur et de la beauté, comme une raillerie infernale de notre faiblesse et de notre douleur ? non, non ! Ô Siegel, j’aime une femme.

SIEGEL.

Une femme ! Je ne savais pas cela. Où l’as-tu vue ?

HERMANN.

Je ne l’ai jamais vue et j’ignore son nom. Nulle bouche humaine ne m’en a parlé, aucun livre n’a décrit sa beauté.

SIEGEL.

Et tu aimes cette femme ?

HERMANN.

Je l’aime d’un grand amour.

SIEGEL.

Frère Hermann, tu es fou.

HERMANN.

Il y a une chose triste à penser, c’est que le doute et la foi de l’homme n’ont en général aucune raison d’être.