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une peau de tigre

deviner la cause. Il crut s’être trompé et continua sa course. Mais cinq minutes s’étaient à peine écoulées, que le même bruit se répéta comme s’il approchait, et Sommerset distingua un froissement d’herbes, qui, malgré son éloignement, indiquait à ne pas s’y méprendre une course rapide et saccadée vers l’endroit où il se trouvait. Tout à coup, son cheval s’arrêta, les flancs agités de terreur et tout couvert d’écume ; il l’excita des deux éperons, mais inutilement, car loin d’avancer, il s’affaissa sur ses jambes de derrière, poussa un hennissement plaintif et resta couché, la tête allongée et fumante.

Lord Henry se débarrassa des étriers, prit un pistolet de chaque main, les arma avec soin et attendit. Tout à coup un horrible rauquement l’assourdit, les herbes de la savane s’écartèrent violemment en s’écrasant, et en moins de trois secondes, un poids énorme le renversa, deux fers rouges s’enfoncèrent dans ses épaules, un coup de pistolet partit et tout fut dit.

La nuit s’écoula. Vers quatre heures du matin un jeune Hottentot rencontra au milieu de la savane un beau cheval complètement harnaché qui errait sans maître. Il voulut s’en emparer, mais le cheval lui échappa et le conduisit à sa poursuite dans le sentier de la montagne. Là gisaient,