Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/234

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
210
la princesse yaso'da


Le génie Jama lui répondit : Les cruels Nats, qui habitent les neiges du Jougando, m’ont lié, grâce au sommeil qui m’a surpris. Si j’eusse été éveillé, cela ne serait point arrivé ; car ma force eût été bien supérieure à la leur. Mais il est dit qu’un génie Jama, lié pendant son sommeil par les génies Nats, ne pourra briser ses liens, ni punir ses ennemis, qu’à l’aide d’un homme brave et généreux. Cela est juste. Le sommeil est une faute. Pendant le sommeil, nous ne pouvons veiller sur la race humaine que nous aimons.

Tamaya, saisi de compassion, chercha de nouveau un sentier pour aller au fond de l’abîme où le génie était lié ; mais les parois en étaient verticales, et pas une seule liane n’y serpentait.

Voyant cela, et entendant le Jama se lamenter, il s’élança courageusement dans le gouffre. — Mais aussitôt, et comme il roulait encore dans le vide, le génie Jama, rejetant ses liens factices, vola au-devant de lui et l’emporta sur l’autre bord, où il le déposa sur la mousse. Alors il lui dit : — Ceux qui prétendent que ton cœur est dur comme le diamant ne mentent pas ; mais il est généreux et tendre comme celui d’une vierge. Mon nom est Atouli-Jama. — J’aime les braves et les bons. — Va ! retourne auprès du saint roi. Si bientôt tu as besoin de mon aide, crie trois fois mon nom. Adieu.

Le jeune guerrier, poursuivant sa route, entra, au bout de