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dianora


Après beaucoup de difficultés de la part du vieux domestique, il fut admis dans la salle dont nous avons parlé déjà, laquelle devait être un jour le lieu d’une catastrophe si terrible. Mme Catherine reçut seule le jeune gentilhomme car, au grand chagrin de celui-ci, Dianora n’était point présente. L’austère dame inclina sa tête embéguinée en réponse aux salutations de Puccinelli ; puis, lui désignant un siège de la main, elle lui dit avec une froide politesse :

— Seigneur cavalier, que désirez-vous de moi ?

Puccinelli, qui avait arrondi par avance un beau discours, se sentit pris d’un si grand battement de coeur, qu’il ne put rien répondre, si ce n’est quelques mots sans suite, où perçait clairement le trouble de son âme. Mme Catherine réitéra sa question.

— Madame, dit enfin Puccinelli, vous pouvez décider du malheur ou du bonheur de toute ma vie. Je viens vous supplier de m’être favorable.

— Vous vous trompez sans doute, seigneur, répondit Mme Catherine ; je vous connais à peine de vue, et j’ignore même votre nom.

Cela était faux ; mais la vieille dame voulait faire entendre au gentilhomme qu’il ne lui plaisait point, car elle devinait bien où il en voulait venir.

— On m’appelle Pierre de Puccinelli, Madame ; ma famille