Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/138

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
114
sacatove


Les noirs firent des signes muets d’assentiment ; et Sacatove, s’approchant de l’ouverture de la caverne, prit son bâton entre ses dents, et disparut en gravissant le tronc noueux de la liane.

Le détachement descendait la montagne une heure après cette scène. Le frère de Maria s’était attardé de quelques pas pour abattre un beau pié-jaune qu’il se baissait pour ramasser, quand il se sentit renversé sur le ventre par une force bien supérieure à la sienne, et il entendit une voix bien connue lui dire en créole :

— Bonjour, maître ! Mademoiselle Maria se porte bien et vous reverrez bientôt. Ne vous étonnez pas, maître, c’est moi, Sacatove. Mes compliments au vieux blanc. Adieu, maître ! Le jeune créole, rendu à la liberté de ses mouvements, se releva vivement et plein de rage, mais le noir était déjà à trente pas, et quand il voulut le poursuivre, l’autre disparut dans le bois.

Le lendemain du jour fixé pour le retour de Maria, comme son père et son frère passaient sous sa fenêtre en fumant leurs pipes, ils l’y aperçurent tout à coup, et le premier s’écria :

— Comment ! c’est toi, Maria ! Et d’où viens-tu ?

— Plus bas ! répondit la jeune fille en se penchant en dehors la fenêtre. J’ai été emmenée dans les bois par Saca-