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XI
préface

de ses contes, parce que cette Italienne, cousine par sa passion sombre des amoureuses d’Afrique, est cause de douleur et de mort pour les hommes qui l’approchent.

« Les Italiennes », écrit-il avec une espèce de volupté à se venger, « aiment et détestent avec fureur, il n’y a pas d’homme qui ait l’haleine assez longue pour porter jusqu’au bout le poids de leur haine ou de leur amour. »

Son parti est si énergiquement pris que désormais quand la nécessité du décor l’oblige à mettre en scène une jeune fille créole, il écarte décidément toutes les beautés africaines pour ne recommander à nos imaginations que des vierges couronnées d’épis d’or. Ainsi la jeune créole qui trouble l’esclave Sacatove au point de lui faire perdre le goût de la vie est dépeinte avec « une peau de neige, des yeux bleus, des cheveux blonds ». Elle semble une sœur de cette délicieuse Mlle de Lanux, petite cousine du poète que Leconte de Lisle aima d’un amour juvénile et pur, et qui, à jamais divinisée par cette tendresse, passe, dans le demi-jour du Manchy, avec « ses yeux de sombre améthyste » et ses cheveux « qui dorent l’oreiller ».

Ce n’est pas trop insister sur une obsession qui commença tôt chez le poète et dura autant que lui.

L’héroïne de sa nouvelle : Une peau de Tigre, qu’il publiait à l’âge de vingt-deux ans, est une jeune Hollandaise blonde.

La vierge qui apparaît dans Le songe d’Hermann a « les yeux bleus, les cheveux blonds ».

La jeune fille qu’on aperçoit dans la Rivière des Songes est une enfant de seize ans qui a l’idéale beauté des femmes du Nord, quand elles unissent à la limpidité fluide des yeux, à la transparence de la peau, l’abandon pensif et harmonieux de la démarche et de la pose ».

D’autre part, des documents que nous avons sous les yeux, témoignent, qu’au moment même où Leconte de Lisle arrivait