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HYPATIE ET CYRILLE.

Femme, n’a point parlé comme, aux siècles profanes,
Les sophistes païens couchés sous les platanes ;
Et si quelque clarté dans leur nuit sombre a lui,
L’immuable lumière éclate seule en lui !
Il est venu ; des voix l’annonçaient d’âge en âge ;
La sagesse et l’amour ont marqué son passage ;
Il a vaincu la mort, et, pour de nouveaux cieux,
Purifié le cœur d’un monde déjà vieux,
D’un souffle balayé des siècles de souillures,
Chassé de leurs autels les Puissances impures,
Et rendu sans retour par son oblation
La force avec la vie à toute nation !
Parle ! de l’œuvre humaine est-ce le caractère ?
Compare au Christ sauveur les sages de la terre
Et mesure leur gloire à son humilité.



HYPATIE.


Ce serait prendre un soin trop plein de vanité.
Toute vertu sans doute a droit à nos hommages,
Et c’est toujours un Dieu qui parle dans les sages.
Je rends ce que je dois au Prophète inspiré,
Et comme à toi, mon père, il m’est aussi sacré ;
Mais sache dispenser une justice égale,
Et de ton maître aux miens marque mieux l’intervalle.
Sois équitable enfin. Que nous reproches-tu ?
Ne veillons-nous pas seuls près d’un temple abattu,
Sur des tombeaux divins qu’on brise et qu’on insulte ?
Prêtres d’un ciel muet, naufragés d’un grand culte,