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POÈMES ANTIQUES.

Ces beaux enfants d’Hellas aux immortels échos
Poussent troupeaux et chars vers les murs d’Iolkos.

Mais voici qu’au détour de la route poudreuse
Un étranger s’avance ; et cette foule heureuse
Le regarde et s’étonne, et du geste et des yeux
S’interroge aussitôt. Il approche. Les Dieux
D’un sceau majestueux ont empreint son visage.
Dans ses regards profonds règne la paix du sage.
Il marche avec fierté. Sur ses membres nerveux
Flotte le lin d’Égypte aux longs plis. Ses cheveux
Couvrent sa vaste épaule, et dans sa main guerrière
Brille aux yeux des pasteurs la lance meurtrière.
Silencieux, il passe, et les adolescents
Écoutent résonner au loin ses pas puissants.
C’est un Dieu ! pensent-ils ; et les vierges troublées
S’entretiennent tout bas en groupes rassemblées.
Mais, semblable au lion, le divin Voyageur
S’éloigne sans les voir, pacifique et songeur.

La nuit emplit les cieux ; le Péliôn énorme
Aux lueurs d’Hékata projette au loin sa forme ;
Et sur la cime altière où dorment les forêts
Les astres immortels dardent leurs divins traits.

Il marche. Il a franchi les roches dispersées,
Formidables témoins des querelles passées,
Alors que les Géants, de leurs solides mains,
Bâtissaient vers les deux d’impossibles chemins,
Et que Zeus, ébranlant l’escalier granitique,