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POÈMES ANTIQUES.

Ce fils usurpateur du char d’Hypériôn,
Cette fille imposée à nos forêts paisibles !
Je défie à la fois leurs colères risibles,
J’appelle à moi leurs traits fatals aux cerfs des bois...
Et toi, mère orgueilleuse, aux échos de ma voix
Irrite tes enfants jaloux ! Ô lâche esclave,
Ô Lèto, Niobé te défie et te brave !


LE CHŒUR


Comme à l’heure où le vent passe au noir firmament,
Les grands arbres émus se plaignent sourdement,
À ce défi mortel la craintive assemblée
Fait entendre une voix de mille voix mêlée,
Mais confuse et pareille à ces lointains sanglots
Que poussent dans la nuit les lamentables flots.
L’aède est tourmenté d’une ardente pensée !

Pâle, les yeux hagards, la tête hérissée,
Depuis que sans retour, ô fière Niobé,
Le blasphème divin de ta lèvre est tombé,
Comme la Pythonisse errante dans le temple,
Il sent venir les Dieux ! Et son œil les contemple,
Et sa voix les annonce ! Et ses bras étendus
Semblent guider leurs coups sur nos fronts suspendus !
La voûte du palais flamboie et se disperse
Comme la foudre fait du ciel noir qu’elle perce...
Les lambris de métal tombent étincelants
Sur les mets renversés et les hôtes tremblants...
Chacun fuit au hasard, et la foule mouvante