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NIOBÉ.

Verra le feu sacré mourir sur ses autels ;
Que les déshérités gisant dans l’ombre avare,
Franchiront glorieux les fleuves du Tartare
Et que les Dieux humains apaisant nos sanglots,
Réuniront la Terre à l’antique Ouranos !

Ô stupide vainqueur du divin Prométhée,
Puisse, du ciel, ta race avec toi rejetée,
De ton règne aboli comptant les mornes jours,
Au gouffre originel descendre pour toujours !
J’ai honte de ton sang qui coule dans mes veines...
Mais toi-même as brisé ces détestables chaînes,
Ô Zeus ! Toi que je hais ! Dieu jaloux, Dieu pervers,
Implacable fardeau de l’immense univers !
Quand mon père tomba sous ta force usurpée
Impuissant ennemi, que ne m’as-tu frappée ?
Mais ta colère est vaine à troubler mes destins :
Je règne sans terreur assise en mes festins ;
Mon époux me vénère et mon peuple m’honore !
Sept filles et sept fils à leur brillante aurore
Plus beaux, plus courageux, meilleurs que tes enfants,
Croissent chers à mon cœur, sous mes yeux triomphants.
Qui pourrait égaler ma gloire sur la terre ?
Est-ce toi, du Titan fille errante, adultère,
Oublieuse du sang généreux dont tu sors,
Toi qui ternis la fleur de tes jeunes trésors,
Et dans l’âpre Délos par Hérè poursuivie,
À deux enfants furtifs vins accorder la vie !
Je brave ces enfants d’une impure union,