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POÈMES ANTIQUES.

Et soutient, le front haut, de ses larges genoux,
Sa lyre créatrice aux accents forts et doux.
Le calme et la bonté, la gloire et le génie
Couronnent à la fois ce roi de l’harmonie.
Dans sa robe de pourpre, immobile et songeur,
Il suit auprès des Dieux son esprit voyageur ;
Il règne, il chante, il rêve. Il est heureux et sage.
Sa barbe, à longs flocons déjà blanchis par l’âge,
Sur sa grande poitrine avec lenteur descend,
Et le bandeau royal couvre son front puissant.
Assise à ses côtés sur la pourpre natale,
La fière Niobé, la fille de Tantale,
Droite dans son orgueil, avec félicité
Contemple les beaux fruits de sa fécondité :
Sept filles et sept fils, richesse maternelle
Qu’elle réchauffe encore à l’abri de son aile.
Auprès d’elle, à ses pieds, actives, et roulant
La quenouille d’ivoire au gré de leur doigt blanc,
Vingt femmes de Lydie aux riches bandelettes
Ourdissent finement les laines violettes.
Telles, près de Thétis, sous les grottes d’azur
Que baigne incessamment un flot tranquille et pur,
En un lit de corail les blanches Néréides
Tournent en souriant leurs quenouilles humides.

Pourtant les serviteurs font d’un bras diligent
Couler les vins dorés des kratères d’argent ;
Le miel tombe en rayons des profondes amphores ;
Aux convives royaux les jeunes Kanéphores