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POÈMES ANTIQUES.

Femmes de Sparte, allez vers les sacrés autels !
          Et que le sang pur des victimes
Et l’encens à longs flots et les chœurs magnanimes,
          Dans l’Olympe aux voûtes sublimes,
          Réjouissent les Immortels !


DÉMODOCE.


Interrompez vos chants, ô Vierges innocentes !
La sombre inquiétude et les peines cuisantes
Du front de notre Hélène assiègent la pâleur.
Ô Vierges, respectez sa secrète douleur !
De votre âge fleuri les tristesses légères
Se dissipent bientôt en vapeurs passagères,
Et de vos yeux brillants les doux pleurs sont pareils
Aux larmes de la Nuit sur les rameaux vermeils :
Prompts à naître, à tarir plus faciles encore.
Votre peine en rosée au soleil s’évapore,
Ô Vierges ! Mais le cœur où les Dieux ont passé
Garde longtemps le trait profond qui l’a blessé
Il se plaît à poursuivre une incessante image,
Et des pleurs douloureux sillonnent le visage.


HÈLÈNE.


Vieillard, le doux repos s’est éloigné de moi :
Mon lâche cœur est plein d’amertume et d’effroi.
Tu l’as dit, de ce cœur profonde est la blessure,
Et les Dieux de ma honte ont comblé la mesure.
Je l’avoue, — et mon front en rougit, tu le vois, —
Mon oreille a gardé le doux son de sa voix ;