Et, la nuit, sous le jet dardé des phalariques,
Aux lueurs de l’asphalte et des fourneaux de briques,
Vingt peuples, mutilés par la forge, et noircis,
Et marqués d’un fer chaud entre les deux sourcils,
Entravés, un carcan de bronze sur la nuque,
Sous le bâton du maître et du hideux eunuque,
Avec les noirs granits, les marbres et les grès,
Ont bâti ces amas de murs démesurés :
Ressen, Kalah, Singar, que gardent des colosses,
Où le chasseur Nimroud a parqué ses molosses,
Et qui montrent, scellés aux fûts de leurs piliers,
Les anneaux de métal rivés à leurs colliers
Terribles, et pareils aux étranges ceintures
Qui pendent aux plafonds des chambres de tortures.
Mais ces villes, dressant au fond du firmament,
De leur base de fange à leur entablement,
L’amoncellement noir de leurs architectures,
Et des Rois disparus les hautes sépultures,
Ces villes, encombrant la face du désert,
Des plaines du Shinar au rivage d’Azer,
Et dont l’ombre, pareille à l’ombre des montagnes,
D’Elam et d’Elassar envahit les campagnes,
Ces villes, où la tour s’étage sur la tour,
Auprès de Ninoua la grande, où règne Asshour,
Sont comme des aiglons sous les ailes de l’aigle.
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