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Avant que le froid noir de l’abîme glacé,
Sur vos mâtures de flamme, n’appesantisse
L’étreinte du linceul implacable, que tisse
Chaque heure descendue aux limbes du passé ?

Vous qui cinglez, parmi la gloire de vos voiles,
Savez-vous, ô vaisseaux qu’enveloppe l’éclair !
Si la houle sans fond de l’impalpable éther
N’est pas faite déjà de cadavres d’étoiles ?

Vous qu’emporte le vent de l’espace et qu’endort,
Comme un souffle nocturne un essaim d’éphémères,
Le retour mesuré des cycles et des ères,
Galères de la nuit, que n’attend aucun port,

Savez-vous si, là-bas, par delà la pensée,
Quelque obscur inconnu, dans ses gouffres en deuil,
Ne garde pas, aveugle et multiforme écueil,
La route sans retour à votre essor tracée,