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Ne parle plus. Ta voix, en qui vibrent encore
Le bronze des tocsins et l’acier des combats,
N’est rien qu’un bruit semblable à tous ceux de là-bas,
Pareil aux autres bruits de la foule sonore,
Qui frappe l’air mortel et ne nous trouble pas.

Mais les ombres par ton verbe ardent remuées,
Forces dont ta pensée est le vivant levain,
Fourmillement farouche où s’ordonnent en vain
Des monstres nés d’un accouplement de nuées,
T’interdisent le seuil où t’attendait ta fin.

Fais comme nous. Bientôt, par degrés insensibles,
Porté sur l’orbe d’or que ton songe a tracé,
Tu t’évanouiras comme un astre glacé,
Comme, au gouffre lacté des univers visibles,
Un soleil décroissant lentement effacé.