Depuis les jours premiers des antiques limons,
Le temple sidéral et la divine Terre
Sont une ombre du rêve où nous nous abîmons,
Le flot illimité des formes et des causes,
Battant à coups rythmés les grèves du trépas,
Efface en se jouant la marque de nos pas,
Mais nous sommes si loin des êtres et des choses
Que, le sachant présent, nous ne l’entendons pas.
L’heure vient, qui n’est plus lumière ni ténèbres,
Où nous ne verrons plus, nous qui voyons sans yeux,
Luire sinistrement, dans le soir odieux,
Sur le chevet sacré de nos couches funèbres,
Le visage du songe indéfini des dieux ;
Où nous-mêmes, dé qui le sommeil n’a pas d’âge,
Mais qui gardons, de la vaine réalité,
L’illusion d’un monde un moment reflété,
Abolirons en nous, sans que rien en surnage,
Cet instant éternel que nous avons été.
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