Mais, voici qu’aux solitudes que l’Ourse éclaire
Se lève le vent pur de la plante polaire.
Il vient, et tourbillonne, et siffle par endroit,
Et saisit, troupeau las de vagues fugitives,
Le chaos des houles rétives,
Sous les mille réseaux invisibles de froid.
Et l’âpre cataracte aux formidables nappes,
Sous ses glaçons rugueux reflétant dans leurs grappes
L’impassibilité flamboyante du ciel,
Rébellion tonnante aux vapeurs de vertige,
Se tait, et, d’un seul bloc, se fige
Dans l’immobile paix du silence et du gel.
Ainsi, lorsque jaillit, en gerbes éclatantes,
L’impérieux appel de nos strophes chantantes,
L’Esprit qui nous possède, et qui dormait en nous,
S’éveille, et, descendant des cimes foudroyées,
Fond, les deux ailes éployées,
Sur les grondantes eaux de notre âme en courroux ;
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