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Ils sont ce qu’ils étaient : entre leurs mains fantômes,
Tournoie, étincelante au fond de mes regards,
La hache à deux tranchants dont se jouaient leurs paumes,
Et le combat cruel enchevêtre ses dards.

Ils vont, spectres armés qu’un éclair me découvre,
Et, sur le monceau nu des grands cadavres froids,
Parmi les chariots aux madriers de rouvre,
Leurs chevaux hérissés renâclent, les crins droits.

Ils sont ce qu’ils étaient aux jours profonds du monde,
Comme si, doux et forts, et tristement altiers,
Ils étaient au soleil, dont l’éclat les inonde,
Du creux des tertres sourds resurgis tout entiers.

Leur pourpre dans mon cœur s’exalte en rouge gerbe,
Quand je lie, ouvrier de mon art souverain,
Les nerfs de la pensée et les muscles du verbe
Au sonore appareil de mes strophes d’airain,