résultat d’études profondes et de raisonnements, qu’une
révolte spontanée de son âme en présence des faits, une
protestation que lui arrache « un instinct de justice sociale et
religieuse[1] ».
Ces paroles sont assez catégoriques pour se
passer de commentaires ; nous verrons donc maintenant ce
que, du poète religieux et républicain, va faire la France
ultramontaine et monarchiste.
Certes le principe de l’influence du milieu me semble indiscutable ; il y a même parfois une relation si étroite entre un auteur et la société, entre un tempérament et un milieu, qu’on songerait volontiers à une harmonie préétablie, à une sorte de loi naturelle qui, réglant à la fois les phases de l’évolution des sociétés et le développement intellectuel de l’individu, dirigerait vers un même but des activités, des forces en apparence opposées, mais qu’elle aurait prédisposées en vue d’une action réciproque. Leconte de Lisle, en arrivant à Rennes, en 1838, pour y faire ses études de droit, y trouva un milieu si différent de celui qu’il venait de quitter, qu’il paraissait devoir en ressentir profondément l’influence et commencer une vie nouvelle.
D’une société exclusivement occupée de ses affaires et de ses intérêts commerciaux, peu ou point religieuse, très superficiellement voltairienne, inapte aux arts et à la philosophie, mais cependant très philosophe, comme on l’avait été en France au siècle précédent ; d’une société athée et libertine par inconscience, pratiquante par habitude et par formalisme, société dont l’expression naturelle avait été Parny, grand-oncle maternel de Leconte de Lisle ; — il passait dans un pays entièrement adonné aux luttes religieuses, avec je ne
- ↑ Voir lettre de Leconte de Lisle à son ami Adamolle.