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témoignage

lourde très puissante, supérieure en nombre et peut-être même en qualité à celle de l’ennemi. »

Et plus loin encore :

« Nous avons été battus, parce que notre organisation militaire reposait sur sa conception de la guerre et de ses moyens d’action dont les événements ont prouvé qu’elle était fausse. »

Quelque lumière qu’on projette plus tard sur la consistance exacte de nos approvisionnements, sinon à la date du 1er septembre 1939 lors de la déclaration de guerre, du moins au 10 mai 1940 où commencèrent les véritables hostilités, quelques points resteront obscurs. Alors que nos ressources en hommes, en armements et en matériel de toute sorte étaient limitées, il semble qu’on eût dû les faire concourir toutes au combat dans cette phase critique qui allait décider du sort de la campagne.

Or, si l’on en croit les échos du procès de Riom, des révélations ont été faites qui ont causé bien des surprises dans l’auditoire. Après l’armistice on aurait retrouvé dans les dépôts et les parcs de l’intérieur un nombre important de chars d’assaut et d’avions en état de marche. Un intendant général, bien placé pour en connaître, aurait révélé que tel entrepôt renfermait pour plusieurs centaines de millions de francs d’effets neufs, alors que des hommes au front manquaient du nécessaire. Moi-même j’ai recueilli de la bouche d’un général d’aviation qui, il est vrai, était partisan de la continuation de la guerre, l’affirmation que les ressources frappé, traversant la France de Paris à Bordeaux à la mi-juin 1940, de voir villages et villes remplis de soldats désœuvrés, alors que leur affectation à des unités de réserve à l’arrière du front eût été si nécessaire pour pourvoir à la relève et à la reconstitution des unités désorganisées dans les premières batailles.

Une sorte de sclérose avait-elle, pendant ces jours néfastes, paralysé notre organisme militaire ? Il avait pourtant fait preuve d’une rare souplesse lors des opérations de mobilisation et de concentration. Pourquoi n’avait-il pas su,