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la bataille de france

çaise, refoulées sur les plages de Dunkerque sous la protection d’arrière-gardes d’une vaillance à toute épreuve, s’embarquèrent pour gagner l’Angleterre sous les rafales meurtrières de l’artillerie et de l’aviation allemandes. Cette opération put être menée à terme sans trop de pertes grâce notamment à l’action incessante de la Royal Air Force qui ne cessa de livrer à la Luftwaffe une rude bataille.

M. Churchill lui a rendu un juste hommage dans son discours du 4 juin 1940 aux Communes. Ce fut, dit-il, une grande épreuve de force entre les aviations britannique et allemande ; ce fut pour cette dernière un échec.

C’est cette même R. A. F. qui, quelques semaines plus tard, remporta dans le ciel d’Angleterre une victoire décisive qu’on a comparée depuis à la bataille de la Marne de 1914. N’est-ce pas elle qui, dans la nuit du 15 septembre 1940, a abattu 185 avions allemands, libérant le ciel d’Angleterre de la menace la plus terrible qu’il ait jamais connue ?

Qui peut dire, dès lors, comment eût évolué la bataille de France qui allait se poursuivre le long de la Somme, de l’Oise, de l’Aisne et de la Meuse, si un millier d’appareils modernes s’étaient joints aux nôtres dans notre ciel, apportant à nos poilus qui accomplissaient à terre de vrais prodiges, une protection efficace contre les stukas déchaînés ?

Dans un discours radiodiffusé du 18 juin 1940, M. Churchill expliqua que, malgré une pression réitérée sous diverses formes, il se refusa toujours de permettre aux forces de chasse métropolitaines de se faire engloutir tout entières dans une bataille dont le résultat final n’eût pas été différent.

Il est possible — c’est le secret du destin — qu’il ait eu raison de réserver ces forces pour des actions futures dont le succès devait par répercussion assurer le salut final de la France. Au moins est-il loyal de reconnaître que, là non plus, notre armée n’a pas trouvé pour supporter le premier choc de l’ennemi et en triompher, tout le concours qu’elle pouvait espérer.

J’exprime encore une fois le regret de rappeler ces faits. Les Britanniques me le pardonneront, connaissant l’esprit dans lequel je le fais. Ils ne peuvent se méprendre sur mes