Page:Lebrun - Témoignage, 1945.djvu/32

Cette page a été validée par deux contributeurs.
20
témoignage

ce dernier s’abstienne de réagir militairement au cas où le Sénat de la Ville libre proclamerait le rattachement de Dantzig au Reich. Il importe en effet que la Pologne ne prenne pas une position d’agresseur qui risquerait d’empêcher le jeu de certains de nos pactes et qui en outre placerait l’armée polonaise de Dantzig dans une situation très dangereuse. Le gouvernement de Varsovie, en pareil cas, se réserverait de défendre ses droits par une action diplomatique. »

Le 24 août, le ministre des Affaires étrangères télégraphie à notre ambassadeur à Varsovie :

« Le gouvernement français recommande instamment au gouvernement polonais de se garder de toute réaction militaire dans l’éventualité d’une proclamation par le Sénat de Dantzig du rattachement de la Ville libre à l’Allemagne. À une décision éventuelle de cette nature, il importe que la Pologne ne réponde que par une action du même ordre en formulant toutes réserves et tous recours de droit opportuns par la voie diplomatique. »

À cette même date, M. Léon Noël écrit à M. Georges Bonnet :

« Au point où en sont les choses dans la Ville libre, ai-je dit à M. Arciszevski, nous comptons que, là comme ailleurs, le gouvernement polonais ne prendra aucune initiative de nature à entraîner l’irréparable sans s’être concerté avec nous au préalable. Je l’ai prié d’informer sans délai de ma communication M. Beck. »

Le lendemain, il écrit encore :

« J’ai attiré une fois de plus au cours d’un entretien avec M. Beck toute son attention sur la nécessité impérieuse d’éviter incidents et imprudences et de faire tout le possible en ce sens. »

Pouvait-on vraiment faire plus ? N’était-ce pas imposer à la Pologne un sacrifice important que de lui demander de s’en tenir à une protestation diplomatique et d’écarter toute action militaire au cas où Dantzig, par la voix de son Sénat, proclamerait son rattachement à l’Allemagne ?

Dans ce domaine encore, la preuve est faite que le gouvernement français a tenté l’impossible pour sauvegarder la paix.