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« comment mourut la paix »


jouer l’accord franco-polonais et obligerait la France à porter immédiatement assistance à la Pologne. »

Voilà qui est parler net.

On pouvait à ce moment prendre une autre attitude : baisser la tête, laisser passer l’orage que l’on sentait venir, dire à la Pologne : « Ne résistez pas, vous serez brisée. » C’était une thèse. À la vérité, c’eût été une indignité, la France y eût perdu l’honneur. Comme l’a proclamé M. Daladier dans son discours du 2 septembre 1939 aux applaudissements unanimes de la Chambre : « Une France qui laisserait s’accomplir cette agression ne tarderait pas à être une France méprisée, une France isolée, une France discréditée, sans alliés et sans appuis et, n’en doutez pas, bientôt soumise elle-même à un effroyable assaut. »

Aussi le ministre des Affaires étrangères prend-il la seule attitude compatible avec l’honneur français. D’où sa note au comte de Welczeck. Mais, s’il n’est pas un enfant, et M. Georges Bonnet n’en est pas un, il doit saisir toute la gravité de sa démarche. Comment, après de telles promesses, la France pourrait-elle ne pas être fidèle à sa parole le jour où les événements envisagés viendront à se produire ?

C’est là où se noue vraiment le drame de la guerre et non, comme le prétendront les plumitifs de la collaboration, dans un Conseil des ministres de dernière heure où de pauvres hommes, sentant l’irréparable sur le point de s’accomplir, font des efforts désespérés pour l’éloigner, tout en restant fidèles aux engagements qui les lient.

Le ministre des Affaires étrangères avait dit au comte de Welczeck, lequel avait rappelé que l’affaire de Dantzig était la dernière à laquelle s’intéressait l’Allemagne, que le gouvernement du Reich avait déjà derrière lui l’Anschluss, les accords de Munich, le protectorat de la Bohême et qu’ainsi personne ne pouvait penser qu’il s’agissait d’une dernière revendication. On ne manquerait pas d’en voir paraître encore d’autres.

Le 13 juillet, M. de Ribbentrop répond à la note de M. Georges Bonnet. Il nie que la réserve de l’article 3 de l’accord du 6 décembre 1938 implique une reconnaissance des accords spéciaux entre la France et la Pologne. Elle se