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« comment mourut la paix »

donné au ministre de Tchécoslovaquie à Berlin, M. Mastny, sa parole d’honneur, en son nom et au nom d’Hitler, que la Tchécoslovaquie n’avait rien à craindre de l’Allemagne. Le Fuhrer lui-même avait dit dans son discours au Palais des Sports à Berlin le 28 septembre 1938 : « C’est la dernière revendication territoriale que j’ai à formuler en Europe (celle des Sudètes). Nous ne voulons pas du tout de Tchèques. »

Mais pourquoi s’interroger sur les contradictions entre les promesses et les actes d’Hitler ? Il suffit de se rappeler ses confidences à ses collaborateurs nazis rapportées par M. Rauschning pour ne pas s’étonner de ses parjures.

Notre ambassadeur juge sévèrement, dans un télégramme du 16 mars, l’opération dont la Tchécoslovaquie vient d’être victime.

« Elle porte, dit-il, à un degré plus grand encore que les précédents coups de force nazis les marques spécifiques des entreprises hitlériennes : le cynisme et la perfidie dans la conception, le secret dans la préparation, la brutalité dans l’exécution… Les accords de Munich n’ont donc été en définitive pour les dirigeants hitlériens qu’un moyen de désarmer la Tchécoslovaquie avant de l’annexer. L’Allemagne a manifesté ainsi une fois de plus son mépris pour tout engagement écrit et sa préférence pour la méthode de la force brutale et du fait accompli. D’un seul geste elle a déchiré les accords de Munich, aussi bien que la sentence de Vienne, prouvant à nouveau que sa politique ne connaissait qu’un principe directeur : épier l’occasion favorable et saisir tout butin à portée de la main ; c’est à peu de chose près la morale commune aux gangsters et aux habitants de la jungle. »

Jugement sévère mais bien justifié quand on le rapproche des événements qu’il se propose d’apprécier.

Le 16 mars, notre ministre des Affaires étrangères appelle l’attention du gouvernement britannique sur la nécessité d’une protestation à Berlin des gouvernements de Paris et de Londres.

« La soumission forcée du gouvernement de Prague imposée brutalement par la pression allemande ne peut être