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grandeurs et servitudes

qu’ont faites beaucoup de candidats à propos du service militaire de trois ans et il est résolu à défendre la loi contre toute tentative de changement, quelles que puissent être, à cet égard, les tendances de la majorité nouvelle. Je lui réponds qu’il a, sur ce point essentiel, ma pleine approbation. L’état de l’Europe nous interdit évidemment d’affaiblir nos moyens de défense.

Page 125. — M. Alexandre Bérard a raison. Mais quelle lourde et pénible charge que celle d’un chef d’État dont le rôle est de faire respecter successivement les idées d’autrui et d’abdiquer ses idées personnelles !

Des hommes politiques, des journalistes, des conseillers officieux viennent me voir, qui me rendent responsable des élections et qui me reprochent plus ou moins ouvertement de m’être endormi dans les délices d’Èze au lieu de prendre moi-même le commandement en chef du suffrage universel. Je les sens très désappointés, aigris, sourdement irrités. La plupart d’entre eux m’engagent à saisir la première occasion de constituer un ministère Delcassé. Mais Delcassé, qui fût volontiers devenu président de la République ou président de la Chambre, a toujours eu fort peu de goût pour la présidence du Conseil et, du reste, M. G. Doumergue ne m’a pas encore annoncé lui-même son intention de se retirer. Je n’ai aucune raison, loin de là, de provoquer sa démission.

Page 130. — « Il m’est très agréable, dis-je à M. Cazeneuve, président du Conseil général du Rhône lors de l’inauguration de l’Exposition de Lyon, de vous entendre déclarer que, fidèle à la vérité constitutionnelle, vous placez en dehors des partis la personne et les fonctions du président de la République. Si, dans l’exercice de sa magistrature, il ne peut encourir aucune responsabilité politique ou parlementaire, c’est qu’il doit rester étranger aux inévitables discussions d’une libre démocratie, c’est qu’il doit être et rester, je me plais à le dire, le président de tous les Français, c’est qu’il doit remplir avec une loyauté scrupuleuse et avec le souci constant des grands intérêts nationaux, le rôle d’arbitre et de conseiller que lui assigne la Constitution républicaine. La France, qui a fait la triste expérience du pouvoir personnel et qui ne la recommencera plus, entend se diriger