Page:Lebrun - Témoignage, 1945.djvu/230

Cette page a été validée par deux contributeurs.
218
témoignage

de la politique et de la diplomatie. Vous y trouverez tout ce que vous cherchez, jusqu’à l’organisation du pouvoir de contrainte mis à la disposition du Conseil de la Ligue pour assurer le respect de ses décisions.

Une question encore se pose ici : Comment accommoder avec l’ensemble du covenant les traités particuliers bilatéraux ou régionaux signés entre divers États membres de la Ligue, tels que les traités anglo-russe, franco-russe, russo-tchécoslovaque ? Déjà des objections ont été formulées par des hommes poussant au suprême degré l’esprit sociétaire ; ils voient dans ces organisations parallèles des germes de contradictions et d’obstacles au fonctionnement régulier de la Société des Nations.

Il me paraît qu’on peut leur répondre ceci. Vraisemblablement un temps viendra, dans un demi-siècle par exemple, où la Ligue avec ses organismes bien au point suffira pour assurer la paix dans le vaste monde et trouver une solution équitable aux conflits politiques et économiques dont sera toujours faite la vie internationale. Mais, d’ici là, il n’est pas mauvais que les États particulièrement menacés sur leurs frontières s’assurent des garanties supplémentaires. Ce serait se faire illusion de croire que l’Allemagne vaincue acceptera de bon cœur les conséquences de sa défaite ; elle cherchera encore une fois à tenter sa chance. N’avons-nous pas entendu raconter autour de nous ces temps derniers qu’au moment de se retirer des officiers allemands disaient : « Nous partons, c’est vrai, mais nous reviendrons dans vingt ans. » Vantardise, sans doute. Avec les Allemands, il faut tout prendre au sérieux.

Il n’est donc pas vain de forger dès maintenant, pour la période encore chaotique que va vivre l’Europe, un instrument d’action plus rapide et plus efficace que celui que pourrait mettre en œuvre un organisme international. Il est certain, surtout après l’expérience de cette guerre, que si l’Allemagne se sent prise entre les deux bras de l’étau franco-russe en même temps que la flotte et l’aviation britanniques dominent ses côtes, elle hésitera à se lancer dans une nouvelle agression. La sagesse sera sa loi.

Donc, acceptation des traités particuliers à la condition,