l’activité matérielle que la France entend reprendre bientôt la place que lui assignent dans le monde sa population de plus de 100 millions d’habitants et les immenses ressources de son sol métropolitain et colonial. La primauté de la France dans tous les temps lui est venue surtout de ses activités intellectuelles et morales. Ce sont ses savants, ses lettrés, ses poètes, ses artistes qui l’ont placée à la tête des nations.
A-t-elle démérité à cet égard ? N’est-elle pas prête à poursuivre sa voie glorieuse et, par exemple, à refaire demain s’il le fallait un Normandie capable de susciter les regards admiratifs du monde entier ? C’est le cas de rappeler ce que disait un jour l’empereur Guillaume II à la princesse Radziwill :
« Je regarde l’existence de la France comme grande puissance comme absolument nécessaire à l’équilibre de l’Europe, non seulement au point de vue de sa force plus ou moins grande, mais au point de vue des qualités qui distinguent ce pays, de sa culture, de son génie, de son mouvement intellectuel surtout dont nous avons tous besoin ; aucun pays ne le vaut sous ce rapport et les lumières qui nous arrivent de ce côté-là nous sont indispensables. »
Un tel propos qui n’est pas suspect suffirait à effacer dans notre esprit les traces douloureuses laissées par le discours de Londres. Aussi bien, le maréchal Smuts a-t-il pris soin lui-même d’en réduire l’importance à ses justes limites lorsqu’à son retour à Prétoria, ému sans doute des conséquences inattendues du discours, il a dit qu’il n’avait aucun caractère officiel ou politique ; il avait voulu seulement lancer dans la circulation quelques idées originales sur lesquelles il lui paraissait intéressant d’ouvrir une discussion.
Comme l’écrivait un journal anglais non sans humour, le cadeau de Noël à offrir à M. Smuts serait une Histoire de France, pour qu’il puisse la connaître, mais c’est là sans doute le moindre de ses soucis dans sa lointaine Afrique du Sud. Il est en tout cas curieux de rappeler que Clemenceau parlant des hommes d’État assemblés à la conférence de la Paix, notait que « Smuts avait le tort de laisser traîner des papiers où il s’était déchargé d’un excès de bile contre la France ».