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« comment mourut la paix »

lution et que, de tous temps, les régimes révolutionnaires ont rompu les barrières de la tradition ; que j’emploie tous les moyens de la ruse et de la feinte, ou que je mette mes armées en marche, je ne vois pas où est la différence. Pour ma part, je la cherche en vain. On me dit que la guerre sanglante passe pour convenable, ou du moins inévitable, à certains moments, dans le monde civilisé. La guerre sourde au contraire serait condamnable. Pourquoi ? C’est une distinction sophistique, c’est de la morale pour vieillards. L’avantage que j’ai sur ces peuples de bourgeois démocrates, c’est justement de n’être arrêté par aucune considération de doctrine ou de sentiment. Exige-t-on que, par générosité, je fasse fi de cette position avantageuse, tout simplement parce que mes adversaires n’en sont pas encore là ? Qu’ils ne s’indignent pas si je les trompe ; qu’ils s’en prennent à eux-mêmes de se laisser tromper.

Page 314. — La grande épreuve ne nous sera pas épargnée. Il faut que nous nous préparions au combat le plus dur que jamais peuple aura supporté. Cette guerre qui trempera nos volontés et nous rendra dignes de notre mission, je la mènerai sans égard pour les pertes que nous subirons. Chacun de nous sait ce que signifie la guerre totale. Je ne reculerai devant aucune destruction. Il nous faudra renoncer à bien des choses qui nous sont chères et qui nous paraissent irremplaçables. Des villes allemandes tomberont en ruines, de nobles édifices disparaîtront pour toujours. Cette fois, notre sol sacré ne sera pas préservé. Mais nous serrerons les dents, nous continuerons à lutter, nous vaincrons. »

Je m’excuse de ces trop longues citations. Elles étaient pourtant nécessaires. Est-il en France, est-il au monde un seul homme qui puisse lire ces lignes sans frémir ? Hitler s’y révèle dans son machiavélisme, sa brutalité, sa cruauté. Cette guerre qu’il envisage froidement, qu’il appelle de ses vœux pour la réalisation de l’hégémonie teutonne au risque d’y sacrifier des millions de jeunes Allemands, comment ne serait-elle pas son fait, alors qu’autour de lui les chefs d’État