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témoignage

« La France n’est pas du tout ravie par l’idée de l’admission de l’Allemagne à la Société des Nations, tandis que l’Angleterre la souhaite afin de balancer l’influence prépondérante de la France à Genève. »

« L’essentiel est (Lettre au Kronprinz) le premier des points que j’énumérais tout à l’heure, la libération de notre sol, la disparition des troupes d’occupation ; il faut tout d’abord que nos étrangleurs lâchent prise, c’est pourquoi la politique allemande devra pour commencer suivre la formule que Metternich, je crois, adoptait en Autriche après 1809 : finasser et se dérober aux grandes décisions. »

« On nous a dit à Locarno que le mot « Alliés » avait perdu son sens, on nous a affirmé du côté anglais que s’il revenait un gouvernement français qui tentât une fois encore une invasion de l’Allemagne, l’Angleterre se tiendrait à nos côtés avec toutes ses forces militaires et autres ressources. Si au contraire le traité est repoussé, Poincaré redeviendrait tout-puissant.»

« Si l’on me dit que je fais une politique anglophile, je réponds que je ne la fais pas pour les beaux yeux des Anglais, mais parce qu’en cette question les intérêts allemands sont conformes aux intérêts anglais et parce que nous avons besoin de quelqu’un qui nous aide à nous débarrasser de l’étrangleur qui nous tient à la gorge. »

« Notre politique concernant l’offre à la France d’un pacte de sécurité était vraiment bonne ; elle a rompu l’entente et nous a ouvert de nouvelles possibilités à l’est. »

« Entre Snowden et Herriot, échange très vif d’explications. Snowden commence une fois par ces mots : My chief point is… Hymans achève la phrase à mi-voix : … to stand always on the side of the german delegation. »

« Je crois d’ailleurs que puisque l’Angleterre a pris son parti et fixé même la date de l’évacuation du Rhin, la France fera bien de suivre l’Angleterre dans l’intérêt de sa situation générale dans le monde, et je crois qu’elle sera obligée d’en passer par là. »

Que de révélations singulières sur cette période trouble de l’après-guerre dans ces quelques lignes cueillies au hasard dans les confidences d’un homme qui servit son pays avec