de me faire retenir une chambre à l’hôtel où je devais arriver au milieu de la nuit. Pendant mon séjour à Nice, je lui rendis visite, mais je fus frappé du ton de sa conversation (il devait quitter son poste quelques jours plus tard).
J’ai pensé que c’était lui qui, bien inutilement d’ailleurs puisque j’avais pris moi-même l’initiative de l’avertir de ma présence, avait alerté le gouvernement français et celui-ci avait fait grief au préfet de l’Isère de ne pas l’avoir tenu au courant de mon déplacement ; il devait à l’avenir se montrer plus attentif.
Quelques jours après, le préfet et le capitaine Mascheroni me rendirent aimablement visite. Je ne leur laissai aucun doute sur la façon dont j’envisageais les soins dont j’étais entouré. À mes yeux, ma sécurité n’était pas en cause. On voulait exercer une surveillance sur mes déplacements. Le préfet m’avait remis antérieurement, lors d’une visite à la préfecture, une note radiodiffusée à Washington disant : « On annonce ici qu’Albert Lebrun s’est échappé de France et qu’il se trouve maintenant dans un pays neutre, à l’abri de la Gestapo. Les milieux officiels de Washington sont très intéressés par cette nouvelle (non confirmée). M. Lebrun pourrait concilier les difficultés qui existent entre de Gaulle et Darlan. Son titre de président n’est pas mis en question, car il n’a jamais démissionné. Mais il est tenu à l’écart sous la pression allemande. La légalité de son titre, en Afrique du Nord ou ailleurs, ne peut être mise en question d’aucun de ces deux côtés, d’après les milieux officiels s’exprimant officiellement. » Il paraissait y avoir un certain rapport entre ces fausses nouvelles lancées par la radio et les mesures de surveillance dont Vizille était l’objet.
Le 9 juin, je dînais tranquillement quand, soudain, la villa fut entourée par une quinzaine de soldats italiens en armes. En même temps un officier demanda à me parler. Je le reçus aussitôt. C’était le même colonel, chef d’état-major de la division. Il m’avisa que, d’ordre de l’autorité, je ne devais pas quitter l’immeuble où je me trouvais. Moment de surprise et d’émoi.
— Que signifie tout cela ? dis-je.
— J’exécute un ordre.