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de paris à bordeaux et à vichy

nouvelle sera illégale si elle n’a pas été d’abord approuvée par le pays.

Il semble que la seconde hypothèse ait répondu à l’opinion moyenne de l’Assemblée, ainsi que tentait de l’exprimer l’amendement présenté par les sénateurs anciens combattants. Étant simplement suspendue, on pouvait lui redonner vie un jour. N’est-ce pas ce que faisait le maréchal lorsqu’en novembre 1943 il avait voulu remettre à l’Assemblée nationale la désignation du chef de l’État, ce dont il fut empêché par une intervention brutale du Fuhrer ? N’est-ce pas ce que fait en ce moment l’opinion française lorsque, lasse de la situation provisoire où elle se trouve, elle réclame des élections en vue de retrouver dans le jeu normal de ses institutions une stabilité si nécessaire à la reprise de la vie économique et à la prospérité générale ?

c) Comment le gouvernement a-t-il appliqué la loi ?

Quoiqu’il en soit de ces diverses hypothèses, le gouvernement se devait, tant que la nation n’avait pas ratifié ses innovations quelles qu’elles fussent, de suivre des voies aussi voisines que possible de celles de la veille, dans la mesure où les injonctions des autorités d’occupation n’y faisaient pas obstacle.

Or il apparaît que, sur plusieurs points, il a violé l’esprit du contrat de bonne foi passé entre lui et l’Assemblée nationale.

Le premier, le plus grave, (je laisse de côté la question de la présidence de la République dont j’ai parlé plus haut,) a été la mise en sommeil des deux Chambres réalisée par l’acte constitutionnel no 3. Cependant il avait été écrit dans l’exposé des motifs du projet de loi : « Le gouvernement aura la collaboration d’une représentation nationale qui jouera auprès de lui son rôle normal. » Par ailleurs, dans son discours à l’Assemblée nationale, le président Laval avait dit : « Il est un engagement que je prends au nom du maréchal Pétain : un acte fixera la position nouvelle du parlement. Les Chambres subsisteront jusqu’à ce que soient créées les Assemblées prévues par la Constitution nouvelle ; ainsi il n’y aura pas un hiatus entre le moment où d’autres Chambres entreront en fonction et le moment où celles-ci disparaîtront. »