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témoignage

se placer en présence des réalités et, comme le dit la déclaration présentée quelques jours plus tard à l’Assemblée nationale, « travailler à l’établissement d’un nouvel ordre continental par un dosage de collaboration avec les puissances latines et l’Allemagne elle-même ? »

22 juin. — Les conditions de l’armistice avaient été connues la veille dans la soirée. Le Conseil des ministres se réunit de une heure à 3 heures du matin pour en prendre connaissance, puis de 8 à 11 heures pour en discuter.

Après un examen d’ensemble, le Conseil décide d’accepter le principe. On étudie ensuite le texte en détail. Des observations sont présentées notamment au sujet de l’article 2 relatif à l’étendue respective des deux zones et à la non-occupation de Paris, de l’article 5 touchant le traitement à appliquer aux avions militaires (stockage et non livraison), de l’article 8 où est traitée la question si délicate de la flotte de guerre, de l’article 21 relatif à la livraison des réfugiés politiques.

Ces diverses questions vont faire l’objet de communications entre Bordeaux et Rethondes, le général Huntziger s’efforçant d’obtenir des améliorations au texte primitif. En fait, les Allemands n’acceptent de modification que sur deux points. Pour le reste, ils prennent note ou rejettent. C’est mal connaître l’ennemi que d’espérer de lui le moindre adoucissement. Il a pour lui la force. Rien ne peut le faire fléchir.

À un moment donné, le général Huntziger fait connaître que les pourparlers doivent prendre fin, sinon il en pourrait résulter de graves conséquences. Il reçoit de Bordeaux l’ordre de signer la convention.

M. Churchill prononce une allocution où, après avoir marqué son indignation des termes de l’armistice, il poursuit :

« Le gouvernement de Sa Majesté croit fermement que, quoiqu’il arrive, il pourra poursuivre la guerre partout où elle peut l’être, dans les airs, sur terre et sur mer, et la mener à une heureuse conclusion. Une fois victorieuse, la Grande-Bretagne prendra à cœur, malgré l’acte du gouvernement de Bordeaux, la cause du peuple français. Une victoire de la Grande-Bretagne constitue le seul espoir possible