prions pour Elle[1] ! (la République). » Arrivé à Dinan, il signera une lettre au même « Salut et fraternité »[2] et dans une autre terminera par ces mots : « Je te charge bien de soutenir nos sentiments républicains et philosophiques ; ce sont les plus vraies comme les plus nobles des opinions humaines. »
Et sitôt débarqué en France, avec les nouvelles
de sa santé et avant les impressions pittoresques
dont pouvaient être avides ses compagnons et
prodigue une jeune vanité littéraire, il envoie « les
plus fraîches nouvelles politiques ». Sa fierté
s’écœure à la bassesse de la situation.
Les Espagnols s’entremangent pour deux rois… les insensés ! Dona Maria est prisonnière des factieux (i) portugais (ce petit pays commence à bien penser). Les Arabes nous marchent sur le ventre, et nous crions : merci !… Les Russes nous menacent de nous donner le fouet si nous ne faisons pas la paix avec l’Afrique : nous obéissons. La Turquie nous donne un soufflet, nous tendons l’autre joue ; et quand nous ne voulons pas nous ravaler à ce point, notre roi nous tue et nous emprisonne. Qu’en dis-tu ? J’espère qu’on n’est
- ↑ Souligné par L. de L.
- ↑ On a raillé Leconte de Lisle sur ses titres de noblesse. Dans sa jeunesse, le poète tenait si peu à son titre qu’il signait, par esprit républicain, Leconte Delisle. Il appartenait d’ailleurs par sa mère, comme celle de Parny une demoiselle de Lanux (Élysée de Riscourt de Lanux), à une famille de la plus vieille noblesse. Sur la famille Leconte de Lisle, on trouvera d’amples renseignements dans l’étude de Ch. Bellier-Dumaine (L’Hermine, mai 1899). C’était vers le milieu du XVIIIe siècle, une famille de petits bourgeois dont les membres embrassaient les carrières libérales ou obtenaient des postes de fonctionnaires.