Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/455

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mêmes rythmes que toutes les poésies qui parurent de 1862 à 1895.

*

Il chanta la Nature en disant son pays. Au contraire de celui d’un Hugo ou d’un Gautier, l’exotisme de Leconte de Lisle est spontané, et comme inconscient. Rien ne sent moins les procédés ni les artifices de l’imagination. Le poète décrit son pays avec le souci scientifique que son œuvre manifeste toujours : aucun détail n’est inexact et si certaines de ses descriptions ont étonné parfois des natifs de Bourbon, c’est que bien des plantes ou des animaux qui y figurent ont depuis disparu.

Les procédés dont il usa ne furent jamais de simples moyens scolaires. Ainsi, s’il employa à la peinture de son pays l’épithète homérique : « maïs onduleux », « bambous géant », « blondes tourterelles », « chiendents amers », ou même le mode de description homérique :


L’aube au flanc noir des monts marchait d’un pied vermeil,


c’est qu’ils convenaient merveilleusement à cette île d’apparence et d’âme helléniques. Un procédé fréquent de composition est de s’adresser à un sens spécial en chaque strophe, inspiré de cette nature qui est une vaste fête pour chaque sens. La nature lui paraît généralement comme l’union des détails les plus divers, un emmêlement tropical où tout rentre et se confond, bruits, mouvements, couleurs, parfums, d’où l’abondance des