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L’ENFANCE DANS L’ÎLE

des créations rythmiques merveilleuses, avec des refrains diversifiés à la fin de chaque strophe. C’est à la fois une valse de Beethoven et un paysage de Van der Neer. Je ne connais rien de plus parfait dans notre langue.


Quant à Parny, qui personnifie l’élégie hypocritement sensuelle, il n’est pas sûr que son œuvre ait seulement égaré un reflet sur celle de Leconte de Lisle. Parmi les poésies copiées par l’écolier, on en rencontre, il est vrai, une de Parny, suivie des vers qu’un membre du Caveau composa à l’occasion de sa mort. Si, à un contour de son enfance et de ses goûts, il apprécia Parny, ce fut parce qu’en Parny il considérait non seulement une célébrité de l’île et de sa ville natale, mais encore le personnage illustre de la famille. Ce fut passager. Plus tard, il déclara assez combien peu il admirait le poète futile des Élégies, autant que le satiriste grivois de la Guerre des Dieux. Il est presque inutile de chercher quelque ressemblance familiale entre le Marivaux égrillard d’une société superficielle et décadente et l’évocateur des primitives époques de robuste félicité humaine[1].

À travers ces romances, voyons seulement une enfance qui fut élégiaque et romanesque dans un alanguissement de liane. Elles permettent de délimiter plus sûrement en la formation de son génie une première période qui fut toute vibrante d’émotions personnelles, exaltée en de lyriques accents,

  1. « L’oncle et le neveu ne se ressemblaient guère », disait L. de Lisle (d’après J. Dornis).