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Cela ressemblait trop à la Légende des siècles[1]. Il craignait peut-être de paraître après Hugo chercher une popularité facile. Mais surtout il avait passé l’heure où on se bat ; il était las des paroles de haine. »

Qu’avec l’âge il y ait eu certaine détente, rien de plus naturel. Mais jamais il ne répudia l’idéal de sa vie. Les Derniers poèmes en témoignent, suite logique des trois premiers recueils. Comme le même pur amour des jeunes années parfuma le déroulement des dernières strophes, le même cœur libéral rythma les vers de la vieillesse ; les sublimes visions de beauté s’y empourprent toujours des ardeurs humanitaires. La Mort d’un moine, parue dans la Revue des Deux-Mondes, a sa place dans le volume posthume entre des pièces telles que la Paix des Dieux, les Raisons du Saint-Père et ce dialogue entre Satan, Cossa et Borgia, qui ne le cède en vigueur antipapiste même à la Bête écarlate. Il ne renonça jamais à l’œuvre finale depuis longtemps promise. Il parla jusqu’en les derniers temps de ces États du Diable, « répétant qu’ils cloraient la série de pièces où il avait montré la férocité du fanatisme religieux ; il assurait qu’il lui restait quelque chose à dire après Hieronymus, l’Holocauste, les Deux glaives, le Corbeau, les Siècles maudits, etc., qu’il voulait faire, une bonne fois, défiler devant lui tous ces tourmenteurs d’hommes et les marquer au fer rouge dans un poème dantesque. Il disait : « Le diable qui les jugera tous, ce sera moi. »

  1. Se rappeler ce qu’a établi M. Brunetière.