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sa maison, au milieu des siens qui vivaient de la subvention impériale, il ne pouvait autrement se comporter.

Il ne paraît donc pas avoir été en rien, homme, ce « sévère pour les autres » et si cavalièrement oublieux de ses « dépendances » qu’on a voulu nous montrer. Le génie ne fut pas atteint de cette « faiblesse ». Jamais son indépendance de penseur hardi ne se sentit contrainte, inquiétée par cetteconcession faite à la vie matérielle : aucune ombre ne s’interposa entre ce qu’il voulut réaliser et ce qu’il réalisa, nul pusillanime scrupule ne tamisa sur la blancheur de la page d’art la large et pure lumière de la pensée. Ce qu’il avait commencé à dire à d’autres époques, sous d’autres régimes, il l’écrivit aussi bien sous l’Empire. Sa haine du clergé éclata, en ses œuvres, toute violente, à l’époque même où l’empire « se mettait en réalité au service de l’Église, combattant au dehors pour le pouvoir temporel, cette séculaire et absurde iniquité, réprimant au dedans toute vie spirituelle qui n’était pas soumise au dogme[1] ».

Quand les papiers de la cassette impériale furent publiés, il fut atterré, sous le coup des insultes des journaux ; mais il est incompréhensible qu’on ait pu attribuer en rien à du remords une semblable douleur. Au moment même où il était écœuré par les désastres, où de vives souffrances physiques se réveillaient par l’effet des nuits de garde sur les fortifications, elle fut profonde, elle acheva de le

  1. Gustave Lanson : Sainte-Beuve politique.