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LECONTE DE LISLE


Une certaine mélancolie enveloppa réellement son adolescence : il n’était point heureux. Pourquoi, de quoi ne l’était-il pas ? on ne sait. Sa plainte est vague, vague comme les fièvres et les indéfinies mélancolies d’adolescence qu’une innocente complaisance étire. Ce n’est point là effet de cette discrétion gardée plus tard sur tous les événements qui entourèrent sa vie, car — sa correspondance et ses premiers poèmes l’attestent — sa jeunesse est lyrique et élégiaque. De la romance donc une lueur s’échappe sur son âme d’adolescent, lueur falote, imprécise, mais par moments vivement palpitante et étrangement éclairante.

À méditer ces vers puérils,


Douces illusions
Charme de la pensée
Sur mon âme agitée
Répandez quelques dons


l’on reconnaît bientôt, à ses premiers accents, le grand cri qu’a poussé continûment le poète épris de


L’unique, l’éternelle et sainte illusion !


À examiner ceux-ci :


De la réalité
Victime est mon jeune âge


l’on augure l’esprit et l’âme de maints de ses définitifs et plus beaux poèmes.

La banalité et la gaucherie confuse du verbe ne cèlent pas la profondeur pessimiste de son tempé-