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Derniers Poèmes, sont connus. Ils affirment, avec une rude franchise, le caractère de l’écrivain : « Je ne désire ni plaire, ni déplaire, » mais être juste ; « si peu que je sois, j’ai trop d’orgueil pour être injuste. » Et ils expliquent son goût permanent de la certitude, constante dans la langue comme dans la pensée, et se traduisant par « la précision vigoureuse de l’image » ou « la forme affirmative habituelle » à ses idées : elle « permet la concision et la netteté ».

Leconte de Lisle est un homme de principes catégorique : il faut « des principes esthétiques », il faut au poète du cœur et de l’énergie. Il faut du cœur : on a tort de confondre sensibilité et sensiblerie : les gens de cœur sont discrets, fermes ; toute la suite lamartinienne larmoie, mais c’est parce que « l’esprit est tendre ; leur cœur est dur » ; « tous ces gredins d’élégiaques, » disait-il dans la conversation, ne sentent rien de ce qu’ils écrivent. Et il reproche à Lamartine les complaisances sentimentales, « la phtisie intellectuelle, les vagues langueurs et le goût dépravé d’une sorte de mysticisme mondain ; à Vigny, sa mollesse, l’incurable élégance qui énerve ses créations. Le poète doit être viril, — ce mot revient à chaque page, — et les Français ont des cœurs lymphatiques ou des âmes énervées. Virilité, volonté : la supériorité de Victor Hugo, son génie, se définit ce une volonté puissante conforme à une destinée » ; Barbier serait un plus grand poète s’il n’avait l’esprit si timide et le caractère indécis : « Avec le goût honnête et louable de l’ordre dans la liberté,