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du beau à travers les civilisations diverses, ainsi peut se définir encore son œuvre. La recherche historique du Beau. Elle donne un sens tout optimiste, une portée toute d’action réconfortante à son œuvre, à la poésie historique. « Pour une élite que nos grandes écoles augmentent chaque année, dit dans une très forte page M. Maurice Barrès qui atteste un sens de l’œuvre lislienne tout autrement juste, sain et puissant que celui de M. Bourget, il était nécessaire qu’un Leconte de Lisle allât s’asseoir à tous ces foyers de civilisation récemment retrouvés, qui troublent notre imagination et qui nous prêchent la vanité de l’effort. Il eut la virilité de maintenir longuement son regard sur des ombres. Sans se laisser alanguir par une atmosphère de sépulcre, il les porta en pleine lumière et les revêtit avec une exactitude minutieuse de tout l’éclat de la vie. Par ce travail, il nous sort de la position fausse où nous nous trouvons vis-à-vis de ces revenants : au lieu d’être pour nous la cause d’évagations énervantes, ils sont devenus les éléments les plus essentiels de notre philosophie. (On sait que philosophie signifie pour M. Barrès, méthode, maïeutique d’activité.) Ces grandes rêveries archéologiques, quand il les eût fait entrer dans la poésie, s’épurèrent et devinrent même un ressort de notre vie intellectuelle. Les poèmes splendides et monotones de Leconte de Lisle, d’un abord si dur[1] qu’on les crut inhumains, ont une vertu réconfortante. Ils délivrent, au sens d’Aristote et de Gœthe, ceux qui,

  1. Au lieu de « monotones », disons : constants ; au lieu de « durs », on pourrait dire de ses vers qu’ils sont corroborants.