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ses avec les fureurs de la démagogie. Au XIXe siècle même, la grande exilée, Mme de Staël, se montre, en son livre Sur la littérature dans ses rapports avec les institutions sociales, d’un hellénisme tout antinapoléonien[1] et, après tout le mouvement orientaliste du Romantisme, George Sand dessine en modèles démocratiques des figures athéniennes et « corinthiennes » dans ses Compagnons du tour de France.

L’hellénisme, forme littéraire des utopies artistisques et civiques des poètes français, reçut une suprême consécration sociale dans l’œuvre de Leconte de Lisle[2]. Il chanta de telle sorte la Grèce qu’il devint sensible que cette Grèce était une manière d’Icarie : elle ne s’évoque point tant en un passé révolu qu’elle ne se projette en un avenir désirable.

Il demande aux Éolides, souffles des temps meilleurs, brises fraîches des années de beauté et de sagesse :


Versez-nous en passant, avec vos urnes d’or,
Le repos et l’amour, la grâce et l’harmonie.


Il ne se contente pas de constater et de flétrir la laideur et la corruption modernes. Son pessimisme, né de l’actualité sociale, ne l’aveugle point jusqu’à l’empêcher de former le rêve lumineux d’une meilleure société future. Après qu’il a écrit du régime capitaliste actuel :

  1. Napoléon 1er était romain contre les Grecs.
  2. M. Léon Bourgeois a noté que L. de L. avait aimé des Hellas race de la liberté, de la lumière et de la certitude.