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aux La Boétie qui en étaient altérés. Chez Rabelais, l’hellénisme est une forme érudite de la haine des moines, de ces mêmes moines qui, au couvent, avaient exercé contre lui de grandes rigueurs pour avoir découvert des livres grecs dans sa cellule ; le château de Ligugé, prototype de l’abbaye communiste de Thélème, était un rendez-vous de savants.

Fénelon, frère de l’arcadien Poussin, écrit le Télémaque, et tout le XVIIIe siècle se tourne vers l’Orient, sous les rêves utopistes, même les rêveries de libertinage. Montesquieu composa « pour les jeunes gens » le Temple de Gnide, sorte d’Embarquement pour Cythère où, en le printemps éternel de la Méditerranée orientale, les amants se goûtent et s’unissent avec une gracieuse liberté, où les êtres, tous destinés à l’amour, s’accordent en une égalité délicieuse, « où les bergères sont confondues avec les filles des rois, car la beauté seule y porte les marques de Tempire. »

Au XVIIIe siècle les hellénisants continuent d’aimer dans la Grèce l’Éden naturiste, par une préoccupation commune aux navigateurs qui vont le chercher en Océanie : le frère de Bougainville, secrétaire perpétuel de l’Académie, écrit : « Jetons un coup d’œil sur le berceau des Grecs : nous y verrons le monde en son enfance et tel que nous le montre encore aujourd’hui l’Amérique, cultivée par des colonies européennes. C’est une belle carrière ouverte à la réflexion. » Initié à 12 ans par la lecture de Robinson[1], puis par ses voyages à Mada-

  1. D’après Aimé Martin, qui établit lui-même les rapports entre