Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/302

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mate qui dore les évocations de Leconte de Lisle comme les grandes fresques communistes du peintre lyonnais, tel est cet « air empli d’arôme et d’harmonie » que respire l’homme grec. Élevé parmi le chœur chantant des vierges, dans le musical accord des familles et des paysages, il est le fils de l’harmonie, il possède le sens poétique — le plus délié et le plus complexe — de la paix. On dit au jeune Ion dans l’Apollonide :


Viens ! tu seras un jour, Enfant, ce que nous sommes.
Sous le casque et l’armure et le lourd bouclier
Tu verseras aussi le noble sang des hommes.
Et sur ton jeune front croîtra le vert laurier.


Mais Ion, sorte d’Eliacin élyséen, élevé dans « le Bois Sacré cher aux Muses », répond :


Il germe ici plus beau, verdoyant dans l’aurore,
Aussi doux qu’une lyre il chante au vent sonore,
Et la Muse divine, avec ses belles mains,
Ne le pose jamais sur des fronts inhumains.


La nature lui a appris l’amour de la beauté et de l’humanité fondues en une même harmonie. Cette société, aussi patriarcale que la primitive humanité biblique, réserve à l’étranger la plus fraternelle hospitalité. L’hôte est accueilli avec une joie sacrée ; quant au poète, il est le musicien, cher aux Dieux et aux hommes, de la paix entre le ciel et la terre, de l’entente des vierges et des adolescents, de l’intimité des enfants et de la famille, de l’alliance entre le passé immortel des aïeux et les générations vivantes, il est la parole d’harmonie qui groupe les êtres et leur fait éprouver la joie profonde de leur accord inaltérable. On lui dit :