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que, c’est qu’il regardait la vie grecque comme un idéal de jeunesse fière et candide contenue dans une calme beauté de lignes pures, — et que la nudité de la beauté antique était comme le symbole de la liberté d’une vie sans entraves, et que le peuple le plus enthousiaste de beauté était le plus ivre de liberté, que les deux grands cultes sont nécessaires l’un à l’autre. Et s’il se détacha quelquefois des foules hurlantes, c’est parce que n’étaient pas encore venues pour elles les heures purificatrices et de beauté qui succèdent à celles de la vengeance. Ce qui l’effarouchait dans le monde moderne, plus que la décomposition des faces indicatrices, c’était la laideur de la médiocrité, la grotesquerie des siestes épaissies des bourgeois « repus », l’étal des vulgaires égoïsmes et des digestions gloutonnes. En une envolée d’âme, il retourne à la vie des premiers hommes.


Reprends-nous, ô Nature, entre tes bras sacrés[1] !
Dans ta klamyde d’or, Aube mystérieuse,
Éveille un chant d’amour au fond des bois épais !
Déroule encore, Soleil, ta robe glorieuse !
Montagne, ouvre ton sein plein d’arôme et de paix !


Et ce pessimisme dont on a tant parlé n’a donc rien de commun avec celui d’un Schopenhauer ni même d’un Vigny. Les célèbres vers de la dernière strophe si souvent cités et qui sont même presque seuls connus de nos professeurs de philosophie

  1. Le sens de ce vers a presque toujours été complètement faussé, parce que cité isolé. Il n’est nullement pessimiste. De même

    « Qu’est-ce que tout cela qui n’est pas éternel ? »
    n’a pas le sens de révolte que lui donne M. Spronck : les mots « l’espérance insensée » le prouvent.