Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/246

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

peut entrer à la Cité du Peuple, sûr qu’il est de n’y pouvoir rester deux jours. Au lieu de perdre son temps dans des réunions, dans d’oiseuses discussions, il travaille à la poésie qui est son mode d’activité sociale. Il n’y a point en effet qu’une seule façon de prendre part à la lutte des classes : composer des poèmes, relever le sens du Beau, en est une, la seule actuellement efficace ; car s’il ne veut pas participer à de nouvelles tentatives révolutionnaires, c’est qu’elles seraient « stériles » et « dévieraient » ; et le devoir de ne pas disperser ses forces, car on s’y dévirilise. S’il a agi en 1848, s’il est « descendu dans le tumulte des choses passagères » c’est afin de « témoigner de sa sincérité, de sa foi et de son aptitude à vivre la vie du vulgaire ».


Paris, 7 septembre 1849.

Je comprends qu’on ait foi en quelques principes supérieurs, généraux, abstraits, à l’aide desquels on édifie spéculativement un système d’idées politiques et sociales…

… Ce que je comprends moins, ce que ne puis m’empêcher de considérer comme étant un acte capable, un oubli irréligieux du devoir élevé qu’il est spécialement donné à l’artiste de remplir, par le fait même de l’organisation particulière dont il est doué, c’est qu’il délaisse, par caprice ou par lassitude, la sphère de son développement intellectuel, et qu’il s’absorbe volontairement en des préoccupations d’un ordre secondaire, préoccupations sujettes à varier tant de fois au gré des sympathies et des antipathies individuelles, et sous l’empire desquelles on vient à subordonner les principes aux hommes et les idées aux faits.

Comment l’artiste ne voit-il pas que tous ces hommes