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naux les attaquent et raillent : l’opinion courante est que les colonies sont uniquement habitées par des nobles et des bourgeois cupides, ennemis acharnés de la République ; et c’est pourquoi des fils de familles créoles résidant à Paris s’agitent, voulant affirmer en face de cette sénile représentation des colonies les idées libérales d’une jeunesse fervente de l’abolition. Leconte de Lisle convoque les compatriotes qu’une haine de l’esclavage égale à la sienne pourrait animer. On se réunit rue de Grenelle, sous la présidence d’Henri de Guigné, plus tard maire de Saïgon et directeur de Moniteur créole, À côté de lui, Leconte de Lisle prend la parole[1]. Il fait ressortir qu’à la Réunion même[2] l’opinion est préparée : une jeunesse ardemment démocratique y représente et défend les idées nouvelles ; il dit la population déjà en grande partie favorable à la suppression de l’esclavage et la honte de voir persister dans une colonie française un régime disparu des autres pays. Il rédige une lettre d’adhésion au Gouvernement provisoire que signent les assistants. Et l’on se rend en bande à l’hôtel-de-ville. On y entre : Vinson et Leconte de Lisle se détachent pour présenter la requête des créoles.

  1. M. de Mahy assistait à la réunion. Sur cette question d’esclavage, cf. son Discours à l’Inauguration de la statue de F. Arago et l’Esclavage à la Réunion, de Benjamin Laroche (1849).
  2. Il s’y était dessiné un mouvement socialiste assez important. Des hommes de réelle valeur, le Dr Reilhac, Barquissau, Legras, Cotteret, etc., — auxquels d’ailleurs Laverdan a consacré une notice dans la Démocratie pacifique, — initiaient aux questions sociales dans le Moniteur Colonial et le Courrier Républicain de Saint-Paul.